TEXTE A - Molière, La Critique de L’École des femmes La Critique de L’École des femmes met en scène un débat entre des personnages adversaires et partisans de la pièce L’École des femmes, « quatre jour après » la première représentation. Quand Dorante entre en scène, la discussion est en cours. Scène V Dorante 1 Remarque moqueuse : une garantie était dite « bourgeoise » quand elle était fournie par une personne solvable. Le marquis est un aristocrate. |
TEXTE B - Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac Le premier acte est intitulé : « Une représentation à l’Hôtel de Bourgogne ». La didascalie initiale indique : « en 1640 ». […] LA SALLE 1 Le cardinal Richelieu, qui assistait parfois aux spectacles, et qui faisait régner son autorité sur les lettres et les arts. |
TEXTE C - Paul Claudel, Le Soulier de satin PREMIÈRE JOURNÉE
[…] Coup bref de trompette.
La scène de ce drame est le monde et plus spécialement l’Espagne à la fin du XVIe, à moins que ce ne soit le commencement du XVIIe siècle. L’auteur s’est permis de comprimer les pays et les époques, de même qu’à la distance voulue plusieurs lignes de montagnes séparées ne sont qu’un seul horizon. Encore un petit coup de trompette.
Coup prolongé de sifflet comme pour la manœuvre d’un bateau. Le rideau se lève.  SCÈNE PREMIÈRE
L’Annoncier1, le Père Jésuite. L’annoncier - Fixons, je vous prie, mes frères, les yeux sur ce point de l’Océan Atlantique qui est à quelques degrés au-dessous de la Ligne2 à égale distance de l’Ancien et du Nouveau Continent. On a parfaitement bien représenté ici l’épave d’un navire démâté qui flotte au gré des courants. Toutes les grandes constellations de l’un et de l’autre hémisphères, la Grande Ourse, la Petite Ourse, Cassiopée, Orion, la Croix du Sud, sont suspendues en bon ordre comme d’énormes girandoles3 et comme de gigantesques panoplies4 autour du ciel. Je pourrais les toucher avec ma canne. Autour du ciel. Et ici-bas un peintre qui voudrait représenter l’œuvre des pirates – des Anglais probablement – sur ce pauvre bâtiment espagnol, aurait précisément l’idée de ce mât, avec ses vergues et ses agrès5, tombé tout au travers du pont, de ces canons culbutés, de ces écoutilles6 ouvertes, de ces grandes taches de sang et de ces cadavres partout, spécialement de ce groupe de religieuses écroulées l’une sur l’autre. Au tronçon du grand mât est attaché un Père Jésuite, comme vous voyez, extrêmement grand et maigre. La soutane déchirée laisse voir l’épaule nue. Le voici qui parle comme il suit : « Seigneur, je vous remercie de m’avoir ainsi attaché… » Mais c’est lui qui va parler. Écoutez bien, ne toussez pas et essayez de comprendre un peu. C’est ce que vous ne comprendrez pas qui est le plus beau, c’est ce qui est le plus long qui est le plus intéressant et c’est ce que vous ne trouverez pas amusant qui est le plus drôle. (Sort l’Annoncier.) 1 L’Annoncier : « devant le rideau baissé », ce personnage, « un papier à la main », a annoncé le titre de la pièce, « Le Soutier de satin ou Le Pire n’est pas toujours sûr, Action espagnole en quatre journées ». |
TEXTE D - Jean Anouilh, Antigone Un décor neutre. Trois portes semblables. Au lever du rideau, tous les personnages sont en scène. Ils bavardent, tricotent, jouent aux cartes. Le Prologue se détache et s’avance. Le Prologue1
Voilà . Ces personnages vont vous jouer l’histoire d’Antigone. Antigone, c’est la petite maigre qui est assise là -bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. Elle pense qu’elle va être Antigone tout à l’heure, qu’elle va surgir soudain de la maigre jeune fille noiraude et renfermée que personne ne prenait au sérieux dans la famille et se dresser seule en face du monde, seule en face de Créon, son oncle, qui est le roi. Elle pense qu’elle va mourir, qu’elle est jeune et qu’elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n’y a rien à faire. Elle s’appelle Antigone et il va falloir qu’elle joue son rôle jusqu’au bout… Et, depuis que ce rideau s’est levé, elle sent qu’elle s’éloigne à une vitesse vertigineuse de sa sœur Ismène, qui bavarde et rit avec un jeune homme, de nous tous, qui sommes là bien tranquilles à la regarder, de nous qui n’avons pas à mourir ce soir. Le jeune homme avec qui parle la blonde, la belle, l’heureuse Ismène, c’est Hémon, le fils de Créon. Il est le fiancé d’Antigone. Tout le portait vers Ismène : son goût de la danse et des jeux, son goût du bonheur et de la réussite, sa sensualité aussi, car Ismène est bien plus belle qu’Antigone, et puis un soir, un soir de bal où il n’avait dansé qu’avec Ismène, un soir où Ismène avait été éblouissante dans sa nouvelle robe, il a été trouver Antigone qui rêvait dans un coin, comme en ce moment, ses bras entourant ses genoux, et il lui a demandé d’être sa femme. Personne n’a jamais compris pourquoi. Antigone a levé sans étonnement ses yeux graves sur lui et elle lui a dit « oui » avec un petit sourire triste… L’orchestre attaquait une nouvelle danse, Ismène riait aux éclats, là -bas, au milieu des autres garçons, et voilà , maintenant, lui, il allait être le mari d’Antigone. Il ne savait pas qu’il ne devait jamais exister de mari d’Antigone sur cette terre et que ce titre princier lui donnait seulement le droit de mourir. Cet homme robuste, aux cheveux blancs, qui médite là , près de son page, c’est Créon. C’est le roi. Il a des rides, il est fatigué. Il joue au jeu difficile de conduire les hommes. Avant, du temps d’Œdipe, quand il n’était que le premier personnage de la cour, il aimait la musique, les belles reliures, les longues flâneries chez les petits antiquaires de Thèbes. Mais Œdipe et ses fils sont morts. Il a laissé ses livres, ses objets, il a retroussé ses manches et il a pris leur place. 1 Dans la tragédie grecque, le Prologue précédait l’entrée du chœur. De manière originale, Anouilh utilise le mot pour désigner un personnage et la première partie de la pièce. |