TEXTE A - Jean Giraudoux, Amphitryon 38, acte I, scène 5, 1929 Jupiter veut séduire Alcmène qui est résolument fidèle à Amphitryon, son mari. Pour l’approcher et parvenir à ses fins, il lui faut donc éloigner celui-ci en l’envoyant à la guerre et prendre son apparence tandis que Mercure prendra celle de Sosie, le serviteur d’Amphitryon. Jupiter achève sa métamorphose avant de se présenter devant Alcmène. MERCURE : C’est votre corps entier qui doit être sans défaut… Venez là , à la lumière, que je vous ajuste votre uniforme d’homme… Plus près, je vois mal. 1 Élément chimique dont une des propriétés est d’émettre de la lumière dans l’obscurité. |
TEXTE B - Eugène Ionesco, Rhinocéros, acte II, Tableau II, 1959 Dans une petite ville, les habitants se transforment peu à peu en rhinocéros, métaphore de la barbarie. Bérenger, venu rendre visite à son ami Jean, assiste à cette transformation. BÉRENGER : Parlez plus distinctement. Je ne comprends pas. Vous articulez mal. |
TEXTE C - Christine Montalbetti, Le Cas Jekyll, 2007 Réécriture théâtrale d’une célèbre nouvelle de Robert Louis Stevenson, ce monologue met en scène, sous la forme d’une confession au notaire Utterson, l’histoire étrange d’un scientifique, le docteur Jekyll qui, la nuit venue, se transforme en mister Hyde, dangereux criminel. Il relate l’expérience de sa première métamorphose. Il y eut un soir où je sus que j’étais prêt. Ah, my goodness1 ! Or, aussitôt après la douleur considérable, quelque chose de délicieux se met à me couler dans les veines. Chacune est comme un petit ruisseau tout neuf et riant, et qui irrigue de vivifiantes prairies. Peinture exquise ! Je cours vers ma chambre, je veux me voir dans le miroir de ma coiffeuse. Je gambade avec la même joie, je pense, que les premiers hommes qui s’essayèrent à la bipédie. Mon pas est si sautillant, si léger ! La courette me découpe un carré de ciel qui m’est réservé et qui me couvre comme un dais3. Mais l’aube va naître. Mes gens grappillent leurs dernières minutes de sommeil. Sacrebleu ! dieux du ciel ! londonienne frayeur ! Mes os de Hyde cette fois s’étirent, mes muscles s’allongent dans des souffrances terribles. Puis cela cesse. Je me dirige de nouveau, encore haletant, jusqu’à ma chambre, et, dans le miroir de ma coiffeuse, je vois qui ? Jekyll, qui souffle comme un bœuf, ses jolis traits un peu tirés, mais en tout point semblable à celui qu’il a été. Utterson, for God’s sake, have mercy4 !
1 Mon Dieu ! |