Plan de la fiche sur
Je ne suis point, ma guerrière Cassandre de Ronsard :
Introduction
Le
sonnet du latin « soneto » est une forme poétique moderne qui vient d’Italie du Sud. Elle date du XII
ème siècle. Au XVI
ème siècle, Pétrarque écrit un « canzoniere », un recueil sur une femme, Laure.
Ronsard est inspiré par trois femmes : Cassandre, Marie et Hélène et influencé par Ficin. La rencontre, également appelée innamoramento, construit le prétexte à la poésie amoureuse. Les noms d’Hélène et Cassandre rappellent la mythologie grecque avec la guerre de Troie. Les influences mythologique et pétrarquiste sont à la fois lyriques et épiques. Ronsard veut devenir immortel par la poésie amoureuse offerte à la femme aimée, il fait vœu de postériorité.
Dans ce poème extrait du recueil
Les amours, Ronsard célèbre Cassandre Salviati, fille d’un banquier italien et la compare à la Cassandre mythologique, fille de Priam et aimée d’Apollon.
Pierre de Ronsard
Texte du poème
Je ne suis point, ma guerrière Cassandre,
Ni Myrmidon ni Dolope soudard
Ni cet Archer, dont l'homicide dard
Tua ton frère et mit ta ville en cendre.
Un camp armé pour esclave te rendre
Du port d'Aulide en ma faveur ne part,
Et tu ne vois au pied de ton rempart
Pour t'enlever mille barques descendre.
Hélas ! je suis ce Corèbe insensé,
Dont le cœur vit mortellement blessé,
Non de la main du grégeois Pénelée,
Mais de cent traits qu'un Archerot vainqueur
Par une voie en mes yeux recélée,
Sans y penser me tira dans le cœur.
Pierre de Ronsard - Les amours
Cassandre
par Evelyn De Morgan (1855 - 1919)
Annonce des axes
I. La réécriture de la légende de Troie
1. La guerre
2. Les identifications
II. Un amour douloureux
1. La relation entre Corèbe et Ronsard
2. Un amour placé sous le signe de la guerre
Commentaire littéraire
I. La réécriture de la légende de Troie
Ronsard met en scène la guerre de Troie en utilisant son érudition et sa connaissance des textes de Virgile.
1. La guerre
Le champ lexical de la guerre est omniprésent : avec les combattants (archer, soudart), le héros (ma guerrière Cassandre, Myrmidon, Dolope, Pénélée, Corèbe), les actes (homicide, tua, l’enlever, esclave te rendre) et les lieux (Aulide, ton rempart, ta ville en cendre, mille barques, camp armé).
Tout au long du texte on observe une métaphore filée sur la guerre de Troie.
2. Les identifications
Dès l’incipit, « je ne suis point », le sens du poème se construit. Le poète refuse d’être assimilé à la guerre et aux grecs qui ont violenté Cassandre par une négation identificatrice. Pourtant, il s’identifie à Corèbe « Hélas ! je suis ce Corèbe insensé », amoureux de la Cassandre antique qui se déguisa en grec et fut massacré par ses amis. Ronsard se sert de cette légende à son avantage en mettant à l’honneur Cassandre puisque « ma guerrière » est un adjectif de qualité. Il porte sur les événements qui arrivèrent à Cassandre le point de vue des troyens mais il refuse toute assimilation à la guerre bien qu’il se compare au troyen Corèbe.
II. Un amour douloureux
1. La relation entre Corèbe et Ronsard
Il endosse l’identité de Corèbe car le poète est amoureux de Cassandre comme Corèbe le fut de la Cassandre antique (la Cassandre de Ronsard est assimilée à l’héroïne antique). Mais il est blessé mortellement (oxymore) alors que Corèbe est mort. Ainsi, l’amour de Ronsard est vraiment une prouesse supérieure à la guerre car à la différence de Corèbe, qui a trouvé dans la mort l’apaisement de ses souffrances, Ronsard vit toujours avec cette douleur. Son comportement est donc héroïque. Toute la déictique (pronoms, adjectifs.. )met en valeur l’identification héroïque de Ronsard ; ce processus conduit à la sublimation de l’amour que Ronsard porte à Cassandre car il n’y a aucun violence.
2. Un amour placé sous le signe de la guerre
On constate une opposition dans le vocabulaire :
Guerre |
Blessure |
Guerrière, soudart, ta ville en cendre, vainqueur, camp armé, rempart, mille barques, cent traits |
Tua, homicide, dard, mortellement, blessé, tira dans le cœur |
Le feu de la guerre détruit et brûle alors que le feu amoureux vivifié blesse. Il est le héros troyen qui a aimé Cassandre, son amour est donc placé sous le signe de la guerre. On passe de la violence de la guerre à la violence de l’amour, qui est donc présenté comme une guerre intérieure. De plus, les rimes féminines (« cassandre, cendre) encadrent les rimes masculines (soudard, dard(qui font partie de la composition anagrammatique du nom de Ronsard) donc Ronsard se met au centre de son amour pour Cassandre.
On part de Cassandre à cœur donc la mythologie à un mythe personnel.
Conclusion
Ronsard célèbre Cassandre en plaçant sous le signe de la guerre. Il s’identifie à Corèbe mais en refusant la violence et en montrant qu’il souffre plus que le héros troyen, il y a sublimation de l’amour du poète. Ronsard utilise toute son érudition pour exprimer son amour.