Plan de la fiche sur
Tu es plus belle que le ciel et la mer de Blaise Cendrars :
Introduction
Le poème
Tu es plus belle que le ciel et la mer est l'un des premiers du
recueil de
Feuilles de route et précède les notations prisent pendant
le voyage proprement dit. Nous savons que dans sa vie Cendrars a beaucoup voyagé et
a vécu beaucoup d'aventures, d'où ses poèmes sur les voyages. Et nous voyons
que ces poèmes deviennent de plus en plus libres, en effet à la forme versifiée,
il préférera la prose poétique. Nous étudierons dans un premier temps l'aspect élogieux
du voyage, puis la déclaration d'amour faite de ce poème.
Texte étudié
Tu es plus belle que le ciel et la mer
Quand tu aimes il faut partir
Quitte ta femme quitte ton enfant
Quitte ton ami quitte ton amie
Quitte ton amante quitte ton amant
Quand tu aimes il faut partir
Le monde est plein de nègres et de négresses
Des femmes des hommes des hommes des femmes
Regarde les beaux magasins
Ce fiacre cet homme cette femme ce fiacre
Et toutes les belles marchandises
II y a l'air il y a le vent
Les montagnes l'eau le ciel la terre
Les enfants les animaux
Les plantes et le charbon de terre
Apprends à vendre à acheter à revendre
Donne prends donne prends
Quand tu aimes il faut savoir
Chanter courir manger boire
Siffler
Et apprendre à travailler
Quand tu aimes il faut partir
Ne larmoie pas en souriant
Ne te niche pas entre deux seins
Respire marche pars va-t'en
Je prends mon bain et je regarde
Je vois la bouche que je connais
La main la jambe l'œil
Je prends mon bain et je regarde
Le monde entier est toujours là
La vie pleine de choses surprenantes
Je sors de la pharmacie
Je descends juste de la bascule
Je pèse mes 80 kilos
Je t'aime
Blaise Cendrars, Feuilles de route, 1924
Annonce des axes
I. L'éloge du voyage
1. Champ lexical du voyage
2. Voyage fictif ou réel
3. Contraste avec la vie quotidienne
II. Une déclaration d'amour
1. Champs lexicaux du bonheur et de l'amour
2. Déclaration à qui ?
Commentaire littéraire
I. L'éloge du voyage
1. Champ lexical du voyage
Les verbes "partir" et "quitter" sont répétés à plusieurs reprises
dans le poème, ce qui renforce le désir d'évasion de l'auteur. Le nom "monde"
ouvre l'espace du voyage, le lieu est encore vague, la destination inconnue.
Au vers 24, la gradation croissante "marche part va-t-en" est
de plus en plus violente.
Ce champ lexical est très riche en verbes, surtout à l'impératif, ce qui donne
une tonalité injonctive à ce poème. Le poète s'adresse à son
destinataire en lui donnant des conseils : le voyage est la solution de tous
les problèmes.
2. Voyage fictif ou réel
Ce poème est une invitation à partir dans ses pensées, à rêver.
Dans la première strophe, l'auteur nous convie à un voyage fictif, mais pour
cela il ne faut plus penser aux proches ("femmes", "enfants", "ami", "amie", "amante", "amant")
mais se laisser aller. Tout devient flou
grâce aux répétitions aux vers 7 et 9 ou encore à la strophe 3, où les limites
de la pensée ont disparus. Le verbe "regarde" au vers 8 signifie
imagine. Le lecteur doit se plonger, se concentrer sur ses pensées, pour pouvoir
s'évader mentalement.
De plus le rythme du poème, dû à l'absence de ponctuation, favorise cette libération d'esprit.
3. Contraste avec la vie quotidienne
Les verbes de la strophe 5 expriment le quotidien de même que "je prends mon bain", "la bouche que je connais". Le poète a envie de partir, de
quitter cette vie qu'il connaît, qui est banale, ordinaire et sans attrait. L'expression "ne te niche pas entre 2 seins " est une référence
aux seins matériels, protecteurs qui sont des repères concrets de la vie quotidienne. Ce contraste est aussi marqué par des antithèse:
"quand tu aimes …. Partir"
"Donne prends …. Prends"
"Ne larmoie…….souriant"
Le poète a donc conseillé, presque ordonné au destinataire de partir
pour s'évader mentalement et d'oublier un instant ses proches. Le voyage
est la source du bonheur, il est la solution de tous les problèmes. Le
poète fait aussi une déclaration d'amour.
II. Une déclaration d'amour
1. Champs lexicaux du bonheur et de l'amour
Les expressions "regarde les beaux magasins" et "Et toutes les
belles marchandises" annoncent le bonheur par le biais de la beauté.
Le verbe "aimer" est répété à cinq reprises, ce qui montre que l'auteur a voulu
insister sur ces verbes ; dans un premier temps à la deuxième
personne du singulier, puis à la première personne du singulier. De plus, les
deux derniers vers "Je pèse mes 80 kg" et "Je t'aime" expriment le poids de l'amour
pesant sur le poète. La tonalité lyrique est très importante dans ce poème, car
l'auteur exprime ses sentiments avec passion.
2. Déclaration à qui ?
Le verbe "aimer", pourtant transitif, n'est jamais suivi d'un complément
"quand tu aimes". Le lecteur se pose donc la question qui aimes-tu ?
Est-ce-le destinataire exprimé par le pronom "tu" dans le titre du poème ? Est-ce une femme, est-ce un homme ou une multitude ? Le poète joue de
cette ambiguïté en alternant le masculin et le féminin aux vers 7 et 9.
A la fin du poème, le dernier vers "je t'aime" paraît éclaircir la
situation, mais il n'en est rien. Le pronom "je" représente t-il le
poète, un inconnu, un homme, une femme ? Et qui aime-t-il ?
Le poète brouille l'énonciation pour mieux faire sentir l'hymne à la vie
et à l'amour, du plus proche au plus lointain.
Conclusion
Le poème
Tu es plus belle que le ciel et la mer est donc un éloge du voyage fictif, une évasion mentale, mais aussi une déclaration d'amour générale, à tout le monde ou à une personne. Le poète a instauré une atmosphère mystérieuse, où le lecteur doit s'interroger sur la ou les personnes concernées par son amour.