Plan de la fiche sur un extrait de
Lambeaux de Charles Juliet :
Biographie de l’auteur
Charles Juliet est né en 1934 à Jujurieux (Ain). A trois mois, il est placé dans une famille de paysans suisses qu'il ne quittera plus. A douze ans, il entre dans une école militaire dont il ressortira à vingt, pour être admis à l'Ecole de Santé Militaire de Lyon. Trois ans plus tard, il abandonne ses études pour se consacrer à l'écriture. Il travaille quinze ans dans la solitude avant de voir paraître son premier livre (Fragments préfacé par Georges Haldas).
source : www.pol-editeur.fr
Introduction
Dans ce texte autobiographique, paru en 1995, l’auteur, Charles Juliet, retrace son enfance après avoir évoqué sa mère paysanne. Le narrateur adulte utilise le tu pour s’adresser à sa mère et à l’enfant qu’il était.
Lecture du texte
Annonce des axes
I. Un passage unique par sa structure
1. Causes de cette crise d'adolescent
2. Une originalité poétique
3. Une construction par introspection
II. Une crise qui se poursuit et qui va le remettre en cause
1. La métaphore filée qui donne des images édifiantes
2. Par extension, la métaphore contamine tout le texte et crée un réseau lexical
3. Les symptômes résultants
4. Le dernier paragraphe : l'ultime ressource
Commentaire littéraire
I. Un passage unique par sa structure
1. Causes de cette crise d'adolescent
• Relation charnelle installée entre J et femme chef. C’est un sentiment nouveau pour lui, à un âge où tout est remis en question : ‘La suis avec stupeur sur chemin qu'elle te fait découvrir’ : c'est un apprentissage.
• Liaison en contradiction avec l’éducation religieuse des parents et c'est ce qui le fait culpabiliser ('Tu mourrais de honte si elle savait'). Il a l’impression de trahir ses valeurs et sa mère. Termes religieux : 'infernale descente aux enfers, la voix de la culpabilité, tu te sentais perdu, lacéré ton être'.
• Même si tout lui dit d'arrêter, il a de l’affection pour F : douloureux dilemme où les 2 voix sont pénibles : 'dois-tu céder à désir ou écouter voix culpabilité qui te presse de demander à cette F d'arrêter la ?'
• Termes qui caractérisent l’impasse : Ecartelé, tourments, fissures, lourd secret, révoltes étouffées, brisé,...
• Pour parler de la relation avec F, il utilise terme désir alors que pour M, il utilise amour : elles ne sont pas placées au même plan.
2. Une originalité poétique
• Sorte d'introduction – amorce, 5 paragraphes égaux construits de manière anaphorique (Ainsi + GN) et une conclusion – le bilan de la crise => présentation strophique.
• Plusieurs phrases nominales posent des mots forts, incitent lecteur à s'arrêter dessus.
• Les anaphore et les figures de style participent à la tonalité poétique et montre J à la quête d'un sens.
==> Choix manifeste : poésie de la quête du mieux dire, de l'expression intérieure.
3. Une construction par introspection
• Texte structuré par anaphore et parallélisme : Ainsi + GN qui déclinent les composantes des crises traversées.
Thème général : Crise d'adolescence => Différentes manifestations de la crise : ennui, solitude, coups, cafard, révolte…
L’accumulation accable et écrase de plus en plus.
• Chaque paragraphe qui a une forte unité thématique est défini par un mot-clé.
Exemple : 'Ainsi les révoltes. Mais des révoltes étouffées (Mot clé – Reprise thème avec nuance supplémentaire).
• Nombreux connecteurs logiques : J veut comprendre et se faire comprendre.
==> L essaye de comprendre dans quel état il a été ; analyse ce qu'il a vécu dans cette crise.
II. Une crise qui se poursuit et qui va le remettre en cause
1. La métaphore filée qui donne des images édifiantes
Idée d'un mouvement qui se fait dans temps. 'Se craqueler' montre qu'avant enfance lisse, sans soucis, sans aspiration... première crise intérieure est comparée à :
- 'se craqueler ton enfance'
- 'fissures'
- 's'effondrera'
- 'ravages'
- 'éboulement'
- 'tu serais brisé'
De plus en plus profond (d'abord idée surface enfance, insouciance) : c’est la gradation d'un effondrement intérieur.
2. Par extension, la métaphore contamine tout le texte et crée un réseau lexical
Notion de craquelure qui s'irradie, touche les autres notions :
• Tristesse, spleen avec métaphores, dépression : 'sombre, grisaille, mort, noir, enfers'
• Autre métaphore filée de souffrance : blesser, écraser, lacérer, plonger lame, pulpe, saigne
• irruption angoisse
• Lutte militaire (champ lexical : 'déposer armes, lames, abattre, sous-officier')
• Violence (champ lexical humiliation, injure et termes forts, intenses : 'envahie, t'abattre, irruption, ô combien vain, tant d'efforts, au plus profond...')
==> Il y a un premier signe, point de départ de la crise qui se poursuit et devient plus forte, plus violente : cela produit un mouvement dans le texte.
==> J montre que l’intensité de la crise l'a complètement ébranlé.
3. Les symptômes résultants
• 'impossibilité participer, incapable de parler' : les constructions négatives appuient l’isolement des autres.
• 'impossibilité de t'intéresser à toi-même' : isolement de soi.
• 'vain de travailler, de lutter' : tournures stériles et négatives qui appuient l’enfermement : réduit à l’inaction et au silence pouvant le mener à la dépression.
• 'plus compter que sur toi-même, tu te sentais perdu' : perte de repère, solitude.
• 'culpabilité, ne peux penser rien d'autre (obsession), persuadé que tu étais minable (dévalorisation)'
• ‘envie de meurtre, violence, acte inconsidéré’ : pulsion de mort, peut-être suicide ?
4. Le dernier paragraphe : l'ultime ressource
• 'Mais' : conjonction de coordination antéposé qui marque l’opposition, rupture saisissante avec la descente aux enfers qui précède.
• 'Toujours en toi' : adverbe de permanence, connotation du repère : enfin quelque chose à quoi se raccrocher.
• L’amour pour M est le rempart qui l’empêche de sombrer complètement.
On trouve ici des oppositions avec les paragraphes précédents :
• 'vibre' connote vie, mouvement amorce contraste, J reprend goût à la vie.
• 'te soutient' s'oppose à solitude.
• 't'enjoint de tenir' s'oppose à 'renoncer, déposer armes'.
• 'te montrer docile' s'oppose à 'révoltes'.
==> Réponses point par point aux souffrances précédemment décrites illustrent la force de l’amour pour M.
==> Mot d'ordre qui le sauve' : ne rien faire qui pourrait la peiner.
==> J veut rendre hommage M adoptive ('témoigner gratitude').
Conclusion
• Charles Juliet a vécu une crise et l’écriture lui permet de rentrer au fond de lui-même, d’analyser ses émotions et de mieux se comprendre.
• Il a besoin de dire ce qu'il ressentait et difficulté de s’exprimer comme M.
• Tout revient constamment aux même révoltes, ennuis, solitude : ainsi en écrivant il ressent pratiquement les mêmes obstacles que M (rapprochement).
• Mais en même temps d'un bilan introspectif, J veut remercier M adoptive, offrir la gloire à une « mère toute donnée ».