Nox

Leconte de Lisle - Poèmes Antiques







Plan de la fiche sur Nox de Leconte de Lisle :
Introduction
Texte du poème Nox
Analyse linéaire du poème
Conclusion


Introduction

     Leconte de Lisle (1818-1894), chef de file des parnassiens, a écrit le recueil Poèmes Antiques en 1852. Il se situe entre le mouvement romantique et symbolique. De ce recueil nous étudierons le poème suivant : « Nox ».


Leconte de Lisle
Leconte de Lisle



Texte du poème Nox

Nox


Sur la pente des monts les brises apaisées
Inclinent au sommeil les arbres onduleux ;
L'oiseau silencieux s'endort dans les rosées,
Et l'étoile a doré l'écume des flots bleus.

Au contour des ravins, sur les hauteurs sauvages,
Une molle vapeur efface les chemins ;
La lune tristement baigne les noirs feuillages ;
L'oreille n'entend plus les murmures humains.

Mais sur le sable au loin chante la Mer divine,
Et des hautes forêts gémit la grande voix,
Et l'air sonore, aux cieux que la nuit illumine,
Porte le chant des mers et le soupir des bois.

Montez, saintes rumeurs, paroles surhumaines
Entretien lent et doux de la Terre et du Ciel !
Montez, et demandez aux étoiles sereines
S'il est pour les atteindre un chemin éternel.

O mers, ô bois songeurs, voix pieuses du monde,
Vous m'avez répondu durant mes jours mauvais ;
Vous avez apaisé ma tristesse inféconde,
Et dans mon coeur aussi vous chantez à jamais !

Leconte de Lisle - Poèmes Antiques



Analyse linéaire du poème

Les principaux thèmes de ce poème se recoupent dans toutes les strophes : la Nature divinisée, l’expression des sentiments et des sens, la relation entre le poète et la Nature et l’opposition Terre-Ciel.

Ce poème est composé de 5 strophes de 4 vers en alexandrin.


STROPHE PREMIERE

Cette première strophe fait appel à un descriptif de la Nature.

Vers 1 : « brises » et « apaisées » expriment une notion de calme, de tranquillité. Il y a une césure à l’hémistiche.
Nous avons une antithèse entre « pentes » notion de profondeur et « monts » notion d’altitude.

Vers 2 : Rejet du verbe « inclinent » ainsi mis en valeur. Le mot « inclinent » associé au « sommeil » donne une impression de sérénité presque excessive. De plus « inclinent » réfère à une situation de respect – respect du sommeil réparateur –. « Les arbres onduleux » révèlent une sensation de bercement.

Vers 3 : L’allitération en « s » et le rythme particulier de ce vers sont propices au bercement entraînant le sommeil.

Vers 4 : Apparition du premier connecteur logique « Et ».
Jeu de mot sur « a doré » (adoré). « L’étoile » juxtaposée aux « flots » donne une opposition Terre-Ciel et « doré »-« bleus ». Ce vers montre l’immensité du Ciel confondu avec l’immensité de la Mer.


STROPHE SECONDE

Vers 1 : Césure à l’hémistiche : antithèse « ravins » notion de profondeur et « hauteurs » notion d’altitude. A noter que le coté abrupte du ravin est adouci par ces « contours ». Le mot « sauvages » réfère à la Nature libre.

Vers 2 : Association d’une sensation tactile « molle » à la « vapeur » que nous ne pouvons pas toucher. Référence au brouillard qui « efface les chemins ».

Vers 3 : Antithèse entre « Lune » et « noir ». On peut trouver le champ lexical de la tristesse avec « tristement » et « noirs » nous enfonçant plus profondément dans cette nuit.

Vers 4 : Dans ce vers nous notons deux références aux hommes par ces «oreilles » et ces « murmures » l’homme se tait pour faire place au chant de la Nature (strophe 3) qui le dépasse. La nuit est profonde et la Nature reprend toute sa liberté.


STROPHE TROISIEME

Vers 1 : « Mais » nouveau connecteur avec idée d’opposition : silence puis chant de la Nature. « Mer divine » – Mère Divine – notion du divin chanté = prière.

Vers 2 : Les deux adjectifs « hautes » et « grande » donne une impression de grandeur. Antithèse apparente entre « gémit » qui rappelle un faible cri plaintif et « grande voix ».

Vers 3 : Impression auditive « sonore » associée à un élément non audible : l’« air ». Antithèse « les cieux » sont illuminés par la « nuit » qui est proprement sombre.

Vers 4 : Rejet du verbe « porte » synonyme de puissance : force de l’air, mystère de la Nature.
La « Mer divine » est généralisée par « mers » de même que « forêts » devient « bois ». Le gémissement de cette « grande voix » se transforme en un léger « soupir » porté par l’air. Ainsi ce dernier vers est la synthèse des vers précédents formant la strophe.


STROPHE QUATRIEME

Vers 1 : Rythme : 2-4-6, qui va croissant insiste sur la montée des « saintes rumeurs ». Un premier impératif « Montez » coupe le tableau descriptif que nous avions jusque là, le poème devient prière. Ce rythme donne une impression d’envole qui abouti par « surhumaines ». Oxymore de « saintes rumeurs » en effet la rumeur se définissant comme un bruit confus disposé à une attitude de révolte. L’associant au mot « saintes » l’auteur lui en donne un tout autre sens.

Vers 2 : « Entretient lent et doux » nous fait penser à un dialogue langoureux – amoureux ? — entre la Terre (féminin) et le Ciel (masculin). Le point d’exclamation souligne l’émotion de l’auteur qu’il veut communiquer au lecteur.

Vers 3 : « Montez » anaphorique qui devient une supplique, ascension de La Terre vers le Ciel, la « demande » personnifie la rumeur.

Vers 4 : Si correspond à l’espoir, l’envie. « Chemin éternel » peut être considéré comme la mort, montée au Ciel connotation divine. « Atteindre » donne une idée d’effort.


STROPHE CINQUIEME

Vers 1 : « O » lyrique anaphorique. Le rythme : 2, 4, 6 nous envoûte et nous mène à la prière de l’auteur. Personnification de la Mer et des Bois (cf. strophe troisième vers.4). « Voix » et « pieuses » (diérèse) = prière du monde, généralisation de toutes les suppliques et les plaintes de l’humanité.

Vers 2 : Dialogue entre le poète et la Nature. Allitération en « r » pour montrer la dureté des ces « jours mauvais ».

Vers 3 : Allitération en « s », qui rappelle celle du vers 3 de la strophe première, d’où une idée de bercement, de tendresse maternelle de la Nature envers l’Homme. Nous pouvons interpréter « tristesse inféconde » comme le manque d’inspiration de l’auteur que supprime la Nature elle même source d’inspiration et Muse. Notons le parallélisme de construction des vers 2 et 3.

Vers 4 : « Et » connecteur logique. La Nature est dans le coeur du poète, siège de ses sentiments, telle une Mère bienfaitrice ou une femme aimée. Aussi est à la césure de l’hémistiche du vers donnant un rythme lyrique. « Chantez à jamais » rappelle les louanges divines des anges et des bienheureux et peux être associé au chemin éternel du vers 12.


Conclusion

    Tout au long du poème Nox nous notons une prolifération d’adjectifs précisant les noms (exemples : v.1 : brises apaisées, v.8 mer divine, etc.). Leconte de Lisle joue sur les teintes claires et sombres tel un peintre du Clair Obscur. Nox montre que la Nature est la source d’inspiration principale et indispensable du poète, elle procure douceur et consolation. Elle porte sur elle les souffrances de l’entière Humanité.

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