Plan de la fiche sur
La Pluie de Ponge :
Introduction
Francis Ponge
Francis Ponge (1899-1988) est un poète du XXème siècle proche du surréalisme.
Résistant durant la guerre, il est solitaire mais bien intégré dans la vie de son époque. En 1942, il publie le recueil Le parti pris des choses, il décrit avec son regard des objets ou des phénomènes simples du quotidien. C'est dans ce contexte qu'il décrit « La pluie ».
Tout d'abord, c'est le récit d'une averse qui sera étudié, puis nous verrons en quoi Ponge apporte un regard nouveau sur la pluie.
Texte du poème
La pluie
La pluie, dans la cour où je la regarde tomber, descend à des allures très diverses. Au centre c'est un fin rideau (ou réseau) discontinu, une chute implacable mais relativement lente de gouttes probablement assez légères, une précipitation sempiternelle sans vigueur, une fraction intense du météore pur. A peu de distance des murs de droite et de gauche tombent avec plus de bruit des gouttes plus lourdes, individuées. Ici elles semblent de la grosseur d'un grain de blé, là d'un pois, ailleurs presque d'une bille. Sur des tringles, sur les accoudoirs de la fenêtre la pluie court horizontalement tandis que sur la face inférieure des mêmes obstacles elle se suspend en berlingots convexes. Selon la surface entière d'un petit toit de zinc que le regard surplombe elle ruisselle en nappe très mince, moirée à cause de courants très variés par les imperceptibles ondulations et bosses de la couverture. De la gouttière attenante où elle coule avec la contention d'un ruisseau creux sans grande pente, elle choit tout à coup en un filet parfaitement vertical, assez grossièrement tressé, jusqu'au sol où elle se brise et rejaillit en aiguillettes brillantes.
Chacune de ses formes a une allure particulière : il y répond un bruit particulier. Le tout vit avec intensité comme un mécanisme compliqué, aussi précis que hasardeux, comme une horlogerie dont le ressort est la pesanteur d'une masse donnée de vapeur en précipitation.
La sonnerie au sol des filets verticaux, le glou-glou des gouttières, les minuscules coups de gong se multiplient et résonnent à la fois en un concert sans monotonie, non sans délicatesse.
Lorsque le ressort s'est détendu, certains rouages quelque temps continuent à fonctionner, de plus en plus ralentis, puis toute la machinerie s'arrête. Alors si le soleil reparaît tout s'efface bientôt, le brillant appareil s'évapore : il a plu.
Francis Ponge - Le Parti pris des choses - 1942
Annonce des axes
I. Le temps d'une averse
1. Un phénomène banal et singulier
2. L'ouïe et la vue : la synesthésie
3. Le cadre
4. Il a plu
II. Un regard nouveau sur la pluie
1. Le regard du poète
2. Une forme libre comme la pluie ?
3. Un cycle : mécanisme
Commentaire littéraire
I. Le temps d'une averse
1. Un phénomène banal et singulier
- Phénomène météorologique : phénomène banal
- On méprise la pluie
- On s'intéresse au quotidien
- Averse : une pluie violente qui s'arrête
-> Phénomène ponctuel
-> saisit en cours, on n'a pas le début de l'averse : récit d'un moment
- L'idée du banal investit par la poésie
- Une description scientifique
2. L'ouïe et la vue : la synesthésie
- Champ lexical et description du bruit
-> bruit particulier : « glou-glou », « horlogerie » bruit du tic-tac, etc.
-> « plus de bruit généralisant » : généralisant
-> « un concert sans monotonie, non sans délicatesse. » : le son de la pluie est présenté de façon élogieuse. « sans monotonie » -> vision poétique de la pluie, dont le son est justement plutôt monotone.
-
Allitération en [g] : « glou-glou des gouttières »
- La vue :
-> Description de l'allure, visuel
3. Le cadre
- La pluie ne se réduit pas à la cour mais la description s'arrête à ce cadre, lieu clos qui ne permet pas au regard de s'échapper
* la cour
* les accoudoirs = rebords
* les murs droits et gauches
* toit de zinc
* au centre
* gouttières
* la ville ?
4. Il a plu
- Passé, c'est fini/terminé
- Participe passé : pleuvoir et plaire -> jeu de mot : le poème « a plu ».
II. Un regard nouveau sur la pluie
1. Le regard du poète
- Le regard, le point de vue -> relativisme
-> « je » = le poète
-> Présent d'énonciation
- Subjectivité du poète : « probablement », « semblent »
- Nominalisation « regarder/ regard » le regard du poète
- Une description personnelle de la pluie -> peut être différente de la perception du lecteur
- La pluie revêt des formes très diverses : Convexes, vertical/horizontal, formes particulières, minuscule.
- Beaucoup de
métaphores et
comparaisons, montrant les différentes formes des gouttes : grain de blé, pois, bille, berlingots convexes. Puis les gouttes se rejoignent pour former d'autres formes : nappe très mince, ruisseau creux, filet parfaitement vertical, aiguillettes brillantes.
2. Une forme libre comme la pluie ?
- Disposition typographique
- 4 paragraphes de plus en plus courts avec 1 premier bloc et 3 paragraphes plus courts comme une averse soudaine qui se calmerait ensuite : mimétique.
- Malgré une forme libre, on ressent un effort typologique : un effort de classement par type
- Ponge ne décrit pas la pluie comme une définition de dictionnaire (rubriques entrecroisées).
3. Un cycle : mécanisme
- Mécanisme : horlogerie, mécanique, les rouages, le ressort, la machinerie, appareil brillant, la sonnerie, le gong
- Idée des événements qui s'enchainent petit toit de zinc -> ruisselle en nappe -> gouttière attenante -> filet parfaitement vertical -> sol -> rejaillit en aiguillettes brillantes.
- Mécanisme éphémère, et qui ne laisse pas de traces dès l'apparition du soleil : « tout s'efface bientôt » -> idée que tout à une fin -> parallèle avec le poème
Le Cageot.
- Temps du poème plus court que l'averse (nous n'avons pas le début de l'averse, mais nous avons la fin)
- Proverbe : Après la pluie le beau temps -> cycle
Conclusion
Durant le temps d'une averse, Ponge décrit la pluie comme un mécanisme éphémère.
Ouverture : « Il pleut » Calligrammes dans lequel Guillaume Apollinaire allie la forme à sa vision de la pluie.