Plan de la fiche sur
les scènes 5 et 6 de l'Acte V - Dom Juan de Molière :
Introduction
Impie : se moque de Dieu
Molière, XVIIe siècle, comédie.
Après
Le Tartuffe, Molière publie
Dom Juan en 1665 qui met en
scène un libre penseur d’une ampleur exceptionnelle.
Présenter cet extrait dans lequel Dom Juan rencontre la statue et l’invite à dîner.
Lecture du texte
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Projet collectif - source : litteratureaudio.com
ACTE V
Scène 5
Dom Juan, un spectre en femme voilée, Sganarelle.
Le Spectre, en femme voilée
Dom Juan n'a plus qu'un moment à pouvoir profiter de la miséricorde du Ciel ; et s'il ne se repent ici, sa perte est résolue.
Sganarelle
Entendez-vous, Monsieur ?
Dom Juan
Qui ose tenir ces paroles ? Je crois connaître cette voix.
Sganarelle
Ah ! Monsieur, c'est un spectre : je le reconnais au marcher.
Dom Juan
Spectre, fantôme, ou diable, je veux voir ce que c'est.
Le Spectre change de figure, et représente le temps avec sa faux à la main.
Sganarelle
Ô Ciel ! voyez-vous, Monsieur, ce changement de figure ?
Dom Juan
Non, non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit.
Le Spectre s'envole dans le temps que Dom Juan le veut frapper.
Sganarelle
Ah ! Monsieur, rendez-vous à tant de preuves, et jetez-vous vite dans le repentir.
Dom Juan
Non, non, il ne sera pas dit, quoi qu'il arrive, que je sois capable de me repentir. Allons, suis-moi.
Scène 6
La statue, Dom Juan, Sganarelle.
La Statue
Arrêtez, Dom Juan : vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi.
Dom Juan
Oui. Où faut-il aller ?
La Statue
Donnez-moi la main.
Dom Juan
La voilà.
La Statue
Dom Juan, l'endurcissement au péché traîne une mort funeste, et les grâces du Ciel que l'on renvoie ouvrent un chemin à sa foudre.
Dom Juan
Ô Ciel ! que sens-je ? Un feu invisible me brûle, je n'en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent. Ah !
Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan ; la terre s'ouvre et l'abîme ; et il sort de grands feux de l'endroit où il est tombé.
Sganarelle
Ah ! mes gages ! mes gages ! Voilà par sa mort un chacun satisfait : Ciel offensé, lois violées, filles séduites, familles déshonorées, parents outragés, femmes mises à mal, maris poussés à bout, tout le monde est content. Il n'y a que moi seul de malheureux. Mes gages ! Mes gages ! Mes gages !
Annonce des axes
I. La fin tragique d’un héros de comédie
II. Le défi de Dom Juan
Commentaire littéraire
I. La fin tragique d’un héros de comédie
Fatalité du dénouement, apparition de spectre.
Un spectre à deux visages : femme voilée, représentation
de la femme bafouée.
Temps : Dom juan vit au jour le jour, il oublie son passé, ignore
l’avenir.
La statue impératif (sentence, jugement dernier cf. bourreau, festin
de pierre)
Messager de Dieu les choses sont jouées, plus de conditionnel « arrêtez ».
Dom Juan ne peut plus s’échapper. La statue est la figure du
destin.
Champ lexical religieux : Ciel, flamme, tonnerre qui tombe de…la puissance du destin.
II. Le défi de Dom Juan
Dom Juan se voit infliger un châtiment à la hauteur de ses
péchés : la mort.
Il a enfin un adversaire à sa taille : seul Dieu peut le stopper.
Mais il refuse la domination de son destin, dans le sens ou il l’affronte
et il meurt debout.
Il reste lui-même, matérialiste, rationaliste jusqu’au bout.
« Oui, où faut-il aller ? » Il se met en face de son destin.
Dom Juan est d’autant plus grand que Sganarelle est pitoyable.
Conclusion
Le dénouement était prévisible dès l’acte
3, mais il se fait attendre et est précipité en 2 scènes.
Ceci est contraire au dénouement classique car tous les personnages
ne sont pas réunis sur scène et leur sort n’est pas fixe.
Ce dénouement est ambigu. Au premier degré, la pièce
finit bien et Dom Juan est puni pour ses méfaits, mais au second degré,
en défiant le destin, Dom Juan est un personnage hors du commun. D’autre
part Sganarelle, le garant de la morale se montre pitoyable en réclament
son argent à la mort de son maître. De plus, l’intervention
du merveilleux comme manifestation divine n’est pas forcement crédible
donc on peut se demander si Molière est sincère en faisant
mourir son personnage ou si il se préserve de la censure. Dom Juan
subit il une défaite ? Le « oh ciel » vient de la douleur
physique et sa dernière parole lucide est « non ». Toute
la puissance du ciel peut écraser physiquement un homme mais elle
ne peut rien contre la liberté de conscience et de pensée.