Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes

Rousseau

De "Mais il faut remarquer que la société..." à "...croître avec les moissons".





    Rousseau (1712-1778), est né dans une famille de protestants. Il fuit sa maison très jeune et rencontre Mme de Warens. Il se convertira au catholicisme. Le livre Discours sur les sciences et le arts  le fera connaître en 1750. Rousseau s’oppose à la civilisation. Il prône une vie simple et naturelle. Il rompt avec le catholicisme, se fâche avec Voltaire. Il a écrit des articles musicaux pour l’encyclopédie. Il sera condamné, il s’exilera.

Ses œuvres principales sont :

Thèse de Rousseau :

Il dit que la civilisation est à la source de la corruption (inégalité) des hommes. Cette thèse est un paradoxe, car Rousseau associe la notion de progrès avec celle de corruption. Sa thèse apparaît très clairement dans le paragraphe 2. Par la suite il nous la prouve.


Texte étudié :

      Mais il faut remarquer que la société commencée et les relations déjà établies entre les hommes exigeaient en eux des qualités différentes de celles qu'ils tenaient de leur constitution primitive; que la moralité commençant à s'introduire dans les actions humaines, et chacun avant les lois étant seul juge et vengeur des offenses qu'il avait reçues, la bonté convenable au pur état de nature n'était plus celle qui convenait à la société naissante; qu'il fallait que les punitions devinssent plus sévères à mesure que les occasions d'offenser devenaient plus fréquentes, et que c'était à la terreur des vengeances de tenir lieu du frein des lois. Ainsi quoique les hommes fussent devenus moins endurants, et que la pitié naturelle eût déjà souffert quelque altération, cette période du développement des facultés humaines, tenant un juste milieu entre l'indolence de l'état primitif et la pétulante activité de notre amour-propre, dut être l'époque la plus heureuse et la plus durable. Plus on y réfléchit, plus on trouve que cet état était le moins sujet aux révolutions, le meilleur à l'homme, et qu'il n'en a dû sortir que par quelque funeste hasard qui pour l'utilité commune eût dû ne jamais arriver. L'exemple des sauvages qu'on a presque tous trouvé à ce point semble confirmer que le genre humain était fait pour y rester toujours, que cet état est la véritable jeunesse du monde, et que tous les progrès ultérieurs ont été en apparence autant de pas vers la perfection de l'individu, et en effet vers la décrépitude de l'espèce.

      Tant que les hommes se contentèrent de leurs cabanes rustiques, tant qu'ils se bornèrent à coudre leurs habits de peaux avec des épines ou des arêtes, à se parer de plumes et de coquillages, à se peindre le corps de diverses couleurs, à perfectionner ou à embellir leurs arcs et leurs flèches, à tailler avec des pierres tranchantes quelques canots de pêcheurs ou quelques grossiers instruments de musique, en un mot tant qu'ils ne s'appliquèrent qu'à des ouvrages qu'un seul pouvait faire, et qu'à des arts qui n'avaient pas besoin du concours de plusieurs mains, ils vécurent libres, sains, bons et heureux autant qu'ils pouvaient l'être par leur nature, et continuèrent à jouir entre eux des douceurs d'un commerce indépendant: mais dès l'instant qu'un homme eut besoin du secours d'un autre; dès qu'on s'aperçut qu'il était utile à un seul d'avoir des provisions pour deux, l'égalité disparut, la propriété s'introduisit, le travail devint nécessaire et les vastes forêts se changèrent en des campagnes riantes qu'il fallut arroser de la sueur des hommes, et dans lesquelles on vit bientôt l'esclavage et la misère germer et croître avec les moissons.



Le premier paragraphe :

Nous allons voir comment l’on peut passer de l’homme sauvage à l’homme civilisé.

L’élément qui vient perturber cette vie tranquilles des hommes primitifs, est inconnu. Rousseau dit " le funeste hasard ". On ne sait pas ce que c’est mais ça amène du négatif.

Funeste : qui amène la mort de l’homme, mais pas celle des enfers , celle de l’humanité. C’est un événement x

Le raisonnement de Rousseau :

Il part sur l’hypothèse que l’homme sauvage est bon. C’est un postulat, car c’est une hypothèse nécessaire qui doit être acceptée par le lecteur pour comprendre la suite du texte.

Il utilise alors des termes de modélisation :

-> " dut-être l’époque la plus heureuse et la plus durable ", le terme "plus" employé deux fois montre l’emploi du superlatif. On peut qualifier cette phrase de certitude quasi- absolue.

-> " le meilleur a l’homme ". On remarque là encore un superlatif, avec le mot " meilleur ".

-> " eût du ne jamais arriver ", c’est ici, une hypothèse qui doit être valable aux yeux du lecteur.

-> le verbe " sembler " est une autre marque de modélisation.

-> " on a presque tous trouvé … " Sa thèse ne put donc s’appuyer sur tous le monde.

-> " cet état était le moins sujet aux révolutions ". Cela explique qu’il n’y avait pas de conflits car les hommes n’ont pas de raisons de se révolter.

-> " le bonheur absolu " Est une litote (dire le moins pour suggérer le plus). On peut remarquer un certain nombre de connecteurs logiques.

ainsi………………….quoique…………. ………plus/plus……………………en effet

(suite logique)………..(opposition)……………..(progression)……………….(conclusion)

On peut remarquer que le raisonnement de ce paragraphe est très logique.


Le second paragraphe :

Il n’est composé que d’une seule phrase.

" Tant que … " qui est répété trois fois. Cela montre que par la suite un élément viendra perturber la situation (on peut le remplacer par " aussi longtemps que… "), ce sont des conjonctions de subordination.

Rousseau fait la description des hommes primitifs. Tous les verbes expriment un certain travail (peindre, tailler..).

On trouve le champ lexical du travail naturel. On remarque une évolution, un perfectionnement du travail de l’homme.

Pour Rousseau, il faut se contenter d’être ce que l’on est, pour être heureux (" se contentèrent ", " se bornèrent "…)

" Tant que " exprime aussi une restriction, une limite.

" mais " à la ligne 30 démontre une opposition entre la période d’avant et la période d’après.

C’est un moment imprécis dans l’humanité.

L’homme primitif qui représente le bonheur, et le contraire de l’homme civilisé.

On remarque l’apparition de " dès que " qui exprime le début de la civilisation.

De nouvelles valeurs apparaissent alors :

Dans le premier paragraphe on a "les hommes primitifs sont libres, sains, bons, et heureux"

" libre " représente l’indépendance, " sains " est une qualité physique, " bons ", montre que les hommes primitifs n’étaient pas égoïstes et " heureux " démontre le bonheur total.

Rousseau a donc employé un vocabulaire appréciatif.

Le fragment de phrase " autant que l’on pouvait l’être par leurs nature ", les hommes sont heureux à leurs niveaux autant qu’ils pouvaient l’être.

Dans le second paragraphe, le vocabulaire est dépréciatif (esclavage, misère, sueur). Il y a une métaphore "arroser les champs avec la sueur des hommes". Les efforts des esclaves s’opposent aux campagnes riantes -> agréable à regarder.

On voit déjà des hommes qui dominent d’autres et qui ne travaillent pas. Ils les exploitent.

" les vastes forêts " s’opposent à " campagnes riantes ". C’est un chiasme car on a un adjectif puis un nom, et de l’autre côté un nom puis un adjectif.

Dans les lignes 36-37, les verbes sont inversés. Dans ces deux lignes on voit bien que la misère augmente au fur et à mesure que la civilisation avance.

Le deuxième paragraphe est une phrase coupée en plusieurs périodes (parties).

Le sommet de l’homme primitif et lorsque Rousseau dit "que l’homme était libre, sain … "

Dans les lignes 37-38, Rousseau se considère comme un philosophe. Pour le poète c’est à l’âge de l’or que tout était pour le mieux. Mais pour le philosophe c’est à l’âge du blé ou du fer. C’est le commencement de la corruption. Puis Rousseau donne de nouveau sa thèse, mais d’une manière différente cette fois (civilisé = perdu).

On a une généralisation poussée au maximum (l’homme -> le genre humain ).

Le mot " art " veut dire qui n’est pas naturel, que l’homme a crée (au contraire artifice, artificiel).

Rousseau décrit à travers ces deux paragraphes et demi la déchéance de l’homme, la dégradation de l’humanité.



A QUOI DOIT REPONDRE L’INTRODUCTION ?

Présentation de l'auteur, de l'œuvre et de l'extrait étudié.

Thèse : comment Rousseau tente de justifier sa thèse en développant le tableau d’une humanité idyllique qui sombre dans le malheur.


PLAN :

I. LA THESE DE ROUSSEAU

1. Une thèse basée sur un paradoxe

2. Postulat initial = parfait harmonie

- Bonheur total
- Incertitude, imprécis (hypothèse -> modalisation)
- Habilité de Rousseau : fait de son hypothèse une quasi-certitude
- Affirmation préamptoire (qu’on ne cherche pas à contredire car c’est vrai ou a cause du ton)

3. Construction du raisonnement

- 1er paragraphe il donne sa thèse (paradoxe/postulat)
- 2nd paragraphe en deux parties (périodes) : l’homme primitif puis l’homme civilisé.
- 3ème paragraphe : reprise de la thèse.


II. L’HOMME PRIMITIF IDEALISE

1. L’homme naturel

- Matériaux naturels (coquillages..)
- Travail selon le nature
- Valeurs (bon, sains (robustes), heureux, pitié naturelle…), du vocabulaire appréciatif

2. Les hommes égaux

- Indépendants
- Simplicité (verbes), ils ne cherchent pas a se surpasser.
- Toutes les caractéristiques sont regroupées en une phrase (libres, sains…)
- Voir aussi avec la phrase "autant qu’ils pouvaient l’être par nature"


III. LA DECADENCE / CORRUPTION

1. Vers la décrépitude

- Premier signe " amour propre" et "pitié naturelle qui disparaît", "moins endurants"
- Le travail se perfectionne (cabane, pêche, musique)
- Avance vers la civilisation.
- La décadence est annoncée avec le "tant que"

2. L’apparition de l’aliénation (dépendre de quelqu’un)

a) quand et comment ?
- Quel funeste hasard ? (indéfini et involontaire)
- Agriculture et métallurgie (art -> artificiel)

b) les conséquences
- Propriété, nécessité du travail, esclavage et inégalité.
- Expliquer la phrase "les vastes forets… moissons"

3. Changement brutal

- Lexique : "dès l’instant", "se changèrent", ou "vit bientôt"
- Rythme accéléré : pas de mots de liaisons, énumération, déséquilibre -> conséquences vives, rapides


CONCLUSION

Montrer que dans ce texte Rousseau essaie à la fois de convaincre (car c’est un texte structuré : connecteurs logiques, modalisation) mais aussi de persuader (il joue avec les sentiments du lecteur : misère, esclavage).

  -> motive l’imagination

Répondre à la problématique (que Rousseau montre bien que l’humanité va dans le malheur).


OUVERTURE : Le Mythte du bon Sauvage de Diderot





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Merci à Teddy pour cette analyse sur un extrait du Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes de Rousseau