Germinal

Emile Zola

Septième partie - chapitre 6

De "Etienne prit à gauche..." à "...sans l'avoir jamais vue."





Plan de la fiche sur le chapitre 6 de la septième partie de Germinal de Zola :
Introduction
Lecture du texte
Annonce des axes
Commentaire littéraire




Introduction

    Cet extrait de la fin du roman Germinal, de Emile Zola, est en partie identique à la première page. Le personnage est sur la même route.

    Perspective : rejoindre Paris après une tragédie personnelle et collective.

    De quatre heures du matin à l’aube, l’auteur montre la séparation entre Etienne et ses camarades.
Les trois derniers paragraphes sont des paragraphes de bilan. L’homme est en mouvement dans le dernier paragraphe.

    Intérêt de la page : bilan d’une expérience personnelle, d’une éducation qui aboutit à une conscience de classe.

Germinal - Zola



Lecture du texte


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Lu par Pomme - source : litteratureaudio.com


    Etienne prit à gauche le chemin de Joiselle. Il se rappela, il y avait empêché la bande de se ruer sur Gaston-Marie. Au loin, dans le soleil clair, il voyait les beffrois de plusieurs fosses, Mirou sur la droite, Madeleine et Crèvecoeur, côte à côte. Le travail grondait partout, les coups de rivelaine qu'il croyait saisir, au fond de la terre, tapaient maintenant d'un bout de la plaine à l'autre. Un coup, et un coup encore, et des coups toujours, sous les champs, les routes, les villages, qui riaient à la lumière : tout l'obscur travail du bagne souterrain, si écrasé par la masse énorme des roches, qu'il fallait le savoir là-dessous, pour en distinguer le grand soupir douloureux. Et il songeait à présent que la violence peut-être ne hâtait pas les choses. Des câbles coupés, des rails arrachés, des lampes cassées, quelle inutile besogne ! Cela valait bien la peine de galoper à trois mille, en une bande dévastatrice ! Vaguement, il devinait que la légalité, un jour, pouvait être plus terrible. Sa raison mûrissait, il avait jeté la gourme de ses rancunes. Oui, la Maheude le disait bien avec son bon sens, ce serait le grand coup : s'enrégimenter tranquillement, se connaître, se réunir en syndicats, lorsque les lois le permettraient; puis, le matin où l'on se sentirait les coudes, où l'on se trouverait des millions de travailleurs en face de quelques milliers de fainéants, prendre le pouvoir, être les maîtres. Ah ! quel réveil de vérité et de justice ! Le dieu repu et accroupi en crèverait sur l'heure, l'idole monstrueuse, cachée au fond de son tabernacle, dans cet inconnu lointain où les misérables la nourrissaient de leur chair, sans l'avoir jamais vue.

Germinal - Emile Zola - Septième partie - chapitre 6




Annonce des axes

I. Bilan personnel d’une expérience personnelle, une éducation
1. Etienne semble oublier, dépasser sa tragédie pour renaître en pleine possession de ses moyens
2. Un personnage en marche dynamique
3. Les évocations du passé sont brèves

II. Une solitude cohérente : un héros collectif
1. La solidarité
2. La conscience de cette masse de travailleur
3. Une réflexion fondée sur cette connaissance du travail



Commentaire littéraire

I. Bilan personnel d’une expérience personnelle, une éducation

1. Etienne semble oublier, dépasser sa tragédie pour renaître en pleine possession de ses moyens

Dans les deux pages précédentes, Etienne est présenté comme "heureux de respirer" après la poignée de main avec la Maheude.
Le non dit du texte est intéressant car l’extrait ne mentionne pas le vieillard décharné qu’il était devenu : image du pèlerin qui connaît les lieux. Il a une perspective, il se situe.

2. Un personnage en marche dynamique

Etienne est déterminé, animé d’un projet, fort de son expérience "armée, soldat, raisonneur".
Et cette impression naît d’une dramatique particulière : l’alternance de marche et de réflexion.
"il prit à gauche", "au loin, il voyait", "en face", "à droite" ...
Les évocations de lieu indiquent précisément le trajet d’Etienne. Mais ce qui ressort est l’idée de dynamisme.
=> Etienne se situe, il a une emprise sur les lieux, en opposition avec la topographie confuse des lieux, et labyrinthique.

3. Les évocations du passé sont brèves

"il avait jeté la gourme de ses rancunes", son passé est digéré, Etienne va de l'avant.
Les expressions qui évoquent la lumière sont le symbole de la lucidité, la conscience de classe à laquelle il a accédé.
Il a accédé au droit de marcher dans la lumière après être sorti de l’enfer : "tout l’obscur ... douloureux".

=> C’est un héros solidaire des autres. A travers lui, c’est toute la classe ouvrière qui fait l’apprentissage de sa libération, c’est le sens de la présence des mineurs manifestée par les coups de rivelaines (évoqué dans tout le chapitre). C’est donc un héros exemplaire.


II. Une solitude cohérente : un héros collectif

1. La solidarité

La présence des autres est symbolisée par les coups de rivelaines qui rythment toute la page. Les signes sont imperceptibles sinon sans lui, car en effet, il est initié: "deviné".

Mouvement de haut en bas (vers les mineurs : première correspondance entre surface et profondeur).

2. La conscience de cette masse de travailleur

La masse de travailleur est encore aliéné par le travail "Le travail grondait partout". Leur puissance potentielle est exprimée par "partout" (adverbe de lieu), "d’un bout de la plaine à l’autre", et par la verbe gronder : synonyme de menace.

Les ouvriers sont maîtres de la terre, ils commencent à se faire entendre. On ne dit pas "les travailleurs", mais "le travail" : idée d’union. Le bruit sourd est suggéré par la répétition de "coup", passage du singulier au pluriel. Une certaine obstination et patience. Sonorité sourde : "ou" et "on". Rythme ternaire reprit par "coup", "sous les champs, les routes, les villages".

Les mineurs sont assimilés à des forçats, ils s’opposent à Etienne dans sa lumière.

Zola montre un travail lent et obstiné qui demandera du temps et de la souffrance.

3. Une réflexion fondée sur cette connaissance du travail

Comme l’atteste le lien grammatical : "Et il songeait à présent", lien : un travail intérieur.

a) Etienne envisage de rejeter la violence

"peut-être" : expression du doute.
"vaguement" : réflexion hypothétique, violence => raison ("sans doute", "devinait").

b) Les phrases exclamatives qui suivent


Monologue intérieur qui traduisent son agacement rétrospectif devant une violence qu’il juge inutile : "inutile besogne".
Enumération des trois adjectifs : "arraché", "coupé", "cassé" -> Violence.

c) La conception d’un mouvement ouvrier s’appuyant sur la légalité


L’évocation de la Maheude sert de transition entre le bilan et la nouvelle stratégie.
La Maheude : figure de victime et de bon sens.
Cette transition amène le deuxième mouvement. Il élabore une stratégie de conquête pacifique. Passage au conditionnel présent : valeur potentielle, valeur modale.

Trois adjectifs qui sont autant d’étapes de la lutte, qui sont assimilés à une armée en marche.

Le rejet de l’infinitif "prendre" en fin de phrase, présente la victoire comme un but lointain et difficile : "se serre les coudes" : union, solidarité, opposition entre "milliers de fainéants" et "des millions de travailleurs".

"Ah ! quel réveil de vérité et de justice" : exclamation de plus en plus grande d’Etienne qui traduit le rêve. Et "le matin" qui émet une nouveauté. Parallélisme entre Etienne et ce qu’il imagine.

"vérité et de justice" : deux valeurs fondamentales.

Simplicité du schéma : ordre renversé mais dans le même ordre. Contradiction finale : la haine de la classe ouvrière ("crèverait") contre la figure mythique du capital qui traverse tout le livre (métaphore de l’ogre, du monstre), l’ordre bourgeois = l’argent, un Dieu.

Rage, il faut faire disparaître le capital.





Conclusion





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Merci à celui ou celle qui m'a envoyé cette analyse sur le chapitre 6 de la septième partie de Germinal de Zola