Introduction
Ispahan est paru dans le recueil
Il y a de
Guillaume Apollinaire, édition posthume 1925.
Le début du XXème siècle est témoin d’un
changement des règles poétiques. Guillaume Apollinaire supprime
la ponctuation : c'est donc un poète moderne, il précède
les surréalistes par son renouvellement des formes artistiques.
Notamment :
Alcools en 1913 et
Calligrammes en 1918.
Le poème Ispahan n’a pas de ponctuation -> fluidité,
liberté de
la forme : longueur des strophes et vers variée.
Personnification de la ville -> appel aux sentiments.
Lecture du poème
Ispahan
Pour tes roses
J'aurais fait
Un voyage plus long encore
Ton soleil n'est pas celui
Qui luit
Partout ailleurs
Et tes musiques qui s'accordent avec l'aube
Sont désormais pour moi
La mesure de l'art
D'après leur souvenir
Je jugerai
Mes vers les arts
Plastiques et toi-même
Visage adoré
Ispahan aux musiques du matin
Réveille l'odeur des roses de ses jardins
J'ai parfumé mon âme
A la rose
Pour ma vie entière
Ispahan grise et aux faïences bleues
Comme si l'on t'avait
Faite avec
Des morceaux de ciel et de terre
En laissant au milieu
Un grand trou de lumière
Cette
Place carrée Meïdan
Schah trop
Grande pour le trop petit nombre
De petits ânes trottinant
Et qui savent si joliment
Braire en regardant
La barbe rougie au henné
Du Soleil qui ressemble
A ces jeunes marchands barbus
Abrités sous leur ombrelle blanche
Je suis ici le frère des peupliers
Reconnaissez
beaux peupliers aux fils d'Europe
Ô mes frères tremblants qui priez en Asie
Un passant arqué comme une corne d'antilope
Phonographe
Patarafes
La petite échoppe
Guillaume Apollinaire
Annonce des axes
Commentaire littéraire
I) L'évocation de la ville harmonieuse
Dans Ispahan, Guillaume Apollinaire s’adresse
directement à la ville dès le premier vers : « Pour tes roses »,
vers 13 : « toi-même ». La ville est donc la destinataire du
poème.
« Ton soleil », « tes musiques » -> Apollinaire fait ressortir
la beauté de la ville apparaît dès le début du poème
Ispahan.
Le texte est présenté comme un éloge de la ville :
Vers 16 : la thématique des roses est insistée « l’odeur
des roses de ses jardins ». L’odeur des roses renvoie à une
sensation agréable. Le thème des roses rappelle la beauté des
femmes.
La ville est mise en valeur : « Ispahan » n'apparaît que
dans les vers à décasyllabes (vers rythmés) : vers 15
et 20.
« Visage adoré » (vers 14) renvoie à l’amour
passionné d'un être humain mais c’est ici la ville qui est
l’être aimé.
Vers 30-32 : même les ânes braient si joliment : dans cette ville tout devient beau.
La ville semble être situé dans un pays lointain, ce qui confère un caractère exotique au poème :
Vers 7 et 15 : « musique
s » -> abondance, variété,
diversité, richesse.
Vers 20: « faïences bleues », vers 33 « La barbe rougie
au henné », vers 38 « corne d'antilope » -> renvoie à des
pays lointains, africains.
- La ville appel au plaisir de tous les sens : ouïe, vue, odorat : musiques, couleurs, roses (deux sens : vue et odorat).
Couleurs : grise, bleues, rougies, blanches.
les sens sont unis : vers 7 : « tes musiques qui s'accordent avec l'aube »
vers 23-25 : les éléments sont accordés : « ciel et de terre »
Le poème Ispahan nous livre donc la vision très personnelle de Guillaume Apollinaire sur cette ville.
II) La vision du poète
Vision très personnelle de Apollinaire. Au vers 2, 17 et 37, on retrouve
le « je », vers 8 « pour moi »,
vers 39 « mes
frères ». Apollinaire exprime ce que doit être un poète.
Il est en quête de sensualité et d’amour « Visage
adoré » : la façon dont il décrit la ville
est touchante et fait appel aux sentiments.
Vers 11 : réflexion sur la valeur de son art : « Je jugerai /
Mes vers » -> capacité de changement du poète : poser un
regard neuf sur l'art « désormais » (vers 9).
Vers 12 et 13 « les arts / Plastique » -> sensible à la peinture.
Les enjambements renvoient au style pictural du collage.
Approche intellectuelle : les strophes ont toutes des valeurs particulières, mélange de tout : registres, couleurs, longueurs...
Strophe 5 très longue et strophe 6 : 1 vers.
1 à 13 syllabes par vers, pas de ponctuation.
Strophe 7 : lyrique et strophe 8 : très irrégulière.
Cette irrégularité de la forme du poème renvoie à l’irrégularité et à la
diversité que l’on peut trouver dans une ville.
Conclusion
Avec
Ispahan, poésie d'un genre nouveau, Guillaume
Apollinaire renouvelle un style conventionnel et vante cette ville par l'originalité des
images et des styles (modernité de l'écriture), il en ressort
une impression de plénitude.
Nous avons ici la vision de l'auteur sur l'art et la poésie.