Plan de la fiche sur
L'Enfant de Victor Hugo :
Introduction
Inspiration : guerre d’indépendance grecque (1822 : proclamation d’indépendance).
1822 : Les Turcs reprennent Missolonghi et Athènes. Bataille de Navarin (1827) la Turquie reconnait en 1830 l’autonomie de la Grèce. Bryon meurt dans cette guerre.
Chio : île grecque de la mer Égée, proche de la Turquie dont elle est séparée par un détroit de 8 kilomètres seulement.
Le poème L'Enfant, de
Victor Hugo, mêle le récit à la description et à l’évocation de l’Orient et du mystérieux construit sur un jeu d’opposition. Contraste entre la situation de l’enfant abandonné et les remèdes qui pourraient le consoler. Prépare l’octosyllabe de la réponse finale. Jeu d’oppositions => mise en relief du rôle symbolique de l’enfant. Passage de l’innocence à la violence.
Victor Hugo
Texte du poème L'Enfant
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Lu par René Depasse - source : litteratureaudio.com
L'Enfant
Les turcs ont passé là. Tout est ruine et deuil.
Chio, l'île des vins, n'est plus qu'un sombre écueil,
Chio, qu'ombrageaient les charmilles,
Chio, qui dans les flots reflétait ses grands bois,
Ses coteaux, ses palais, et le soir quelquefois
Un chœur dansant de jeunes filles.
Tout est désert. Mais non ; seul près des murs noircis,
Un enfant aux yeux bleus, un enfant grec, assis,
Courbait sa tête humiliée ;
Il avait pour asile, il avait pour appui
Une blanche aubépine, une fleur, comme lui
Dans le grand ravage oubliée.
Ah ! pauvre enfant, pieds nus sur les rocs anguleux !
Hélas ! pour essuyer les pleurs de tes yeux bleus
Comme le ciel et comme l'onde,
Pour que dans leur azur, de larmes orageux,
Passe le vif éclair de la joie et des jeux,
Pour relever ta tête blonde,
Que veux-tu ? Bel enfant, que te faut-il donner
Pour rattacher gaîment et gaîment ramener
En boucles sur ta blanche épaule
Ces cheveux, qui du fer n'ont pas subi l'affront,
Et qui pleurent épars autour de ton beau front,
Comme les feuilles sur le saule ?
Qui pourrait dissiper tes chagrins nébuleux ?
Est-ce d'avoir ce lys, bleu comme tes yeux bleus,
Qui d'Iran borde le puits sombre ?
Ou le fruit du tuba, de cet arbre si grand,
Qu'un cheval au galop met, toujours en courant,
Cent ans à sortir de son ombre ?
Veux-tu, pour me sourire, un bel oiseau des bois,
Qui chante avec un chant plus doux que le hautbois,
Plus éclatant que les cymbales ?
Que veux-tu ? fleur, beau fruit, ou l'oiseau merveilleux ?
- Ami, dit l'enfant grec, dit l'enfant aux yeux bleus,
Je veux de la poudre et des balles.
8-10 juillet 1828
Victor Hugo - Les Orientales
Annonce des axes
I. Les ravages de la guerre et de la destruction
II. Images de la paix, du bonheur et de l’innocence
III. Vers la clef symbolique du texte
Commentaire littéraire
I. Les ravages de la guerre et de la destruction
Destructions matérielles (champs lexicaux : ruine, deuil...)
Passage du paradis au néant : la première strophe décrit Chio comme une île idéale (anaphore de « Chio » suivie d'expressions montrant le bonheur et l'opulence qui régnaient sur Chio). La deuxième strophe marque la rupture et le résultat de la guerre : « Tout est désert »
Les conséquences affectives :
Solitude et détresse de l’enfant rescapé et abandonné.
Conditions pitoyable (vaincu « tête humiliée »)
Soumission, passivité
Champ lexical du chagrin : larmes, pleurent, chagrins
Pitié du narrateur : passage du récit au dialogue. Interjection, interrogation : sollicitude, consolation.
Attitude protectrice et réconfortante (anaphore « veux-tu »)
II. Images de la paix, du bonheur et de l’innocence
Contrepoint du malheur
Opposition passé/présent et présent/futur :
- Un passé lumineux
- Présent cf. image de l’aubépine échappée du désastre (Vision angélique de l’enfant)
- Futur consolateur
Paix bonheur innocence / enfant / nature heureuse et pacifique
Éléments poétiques de la nature mystérieuse et mythologique. Fleurs, fruits, oiseaux (cf. exotisme)
III. Vers la clef symbolique du texte
Alternance des images de destructions du bonheur
- Destructions et deuil dominent dans les 2 premières strophes
- Équilibre avec joie des strophes 3 et 4
- Domination d’une évocation heureuse dans 5 et 6 (destruction exprimée 2 fois seulement)
=> Évolution vers une évocation consolatrice. Mais le fait que l’enfant ne réponde pas => remèdes insuffisants ? Inadaptés ?
Cela prépare la réponse de l’enfant : « Je veux de la poudre et des balles » : l'enfant veut la vengeance et le combat
Paradoxe : la consolation tend à atténuer le contexte tragique qui n’en revient qu’avec plus de force à la fin du texte.
Caractère farouche et déterminé de la réplique du dernier vers. Chute de l’enfant => Destruction non seulement matérielle mais aussi de l’âme des enfants. Oiseau des bois = oiseau bleu = espérance.
Conclusion
Dénonciation de la guerre => elle fait sortir de l’innocence et jette dans le monde violent des adultes. La cruauté de la vie remplace les jeux.
Inversion des rôles : l’adulte consolateur est « dépassé » par la détermination de l’enfant.
Cf. lutte en faveur de l’enfance malheureuse par Victor Hugo.