Plan de la fiche sur
le chapitre 15 de Si c’est un homme de Primo Lévi :
Introduction
Dans ce chapitre de
Si c’est un homme, Primo Lévi (1919 - 1987) montre sa progression dans la hiérarchie du camp. Du fait de ses aptitudes en chimie, il n'est plus
obligé de se livrer aux travaux physiques à l'extérieur.
Lui a pu intégrer l'équipe du laboratoire, Il réapprend
ainsi le confort, essentiel pour augmenter ses chances de survie dans un tel
univers. Nous verrons tout d'abord les conséquences de ce nouveau statut,
puis comment rejaillissent les sentiments humains chez un homme toujours prisonnier.
Lecture du texte
Annonce des axes
I. L'acquisition d'un statut plus proche de l'humain
1. La redécouverte du travail
2. La possibilité d'un endroit personnel
II. Le souvenir de sa condition perdue d'homme libre
1. A mi-chemin entre l'homme et l'esclave
2. Une apparence physique inhumaine
Commentaire littéraire
I. L'acquisition d'un statut plus proche de l'humain
1. La redécouverte du travail
Primo Lévi n'a pas le sentiment, dans le laboratoire dans lequel il occupe
désormais ses journées, de travailler. A l'intérieur, au
chaud, avec un minimum de confort, il est assis et se livre à des activités
plus intellectuelles. Il avait perdu conscience que la travail pouvait aussi être
de cette nature : "Travailler, c'est pousser des wagons, transporter des
poutres, fendre des pierres, déblayer de la terre, employer à mains
nues l'horreur du fer glacé. Tandis que moi je reste assis toute la journée".
Son travail nécessite comme seul outil un cahier, un crayon, un livre.
Sa condition d'esclave s'en trouve atténuée, dans un lieu où personne
ne le bat, où il a la liberté de sortir s'il le désire.
Il redécouvre ainsi petit à petit sa vie d'avant, et mesure grandement
ses avantages par rapport au reste des prisonniers.
2. La possibilité d'un endroit personnel
Primo Lévi avance un élément fondamental de sa nouvelle
vie, qui est celle de sa "remontée" vers l'espoir et la lumière.
Il possède en effet un "tiroir", dans lequel il peut entreposer
notamment son calot et ses gants. Dans le camp, aucun prisonnier n'a droit à un
lieu fermé pour mettre ses affaires, et chacun doit par conséquent
sans cesse les surveiller afin d'éviter les vols. Ils doivent donc apporter
leurs affaires partout avec eux, au travail comme aux toilettes. L'auteur comprend
ainsi son grand avantage, avec cette possibilité de lieu fermé,
privatif, qui n'appartient qu'à lui, dans lequel personne ne peut rien
lui voler. Cet élément de propriété apparaît
comme essentiel dans sa nouvelle condition, comme un symbole se sa capacité à s'être "débrouillé" pour
améliorer son statut dans le camp, et donc dans la redécouverte
de certains sentiments humains.
II. Le souvenir de sa condition perdue d'homme libre
1. A mi-chemin entre l'homme et l'esclave
Par cette amélioration sociale, sa progression dans la hiérarchie
du camp, Primo Lévi se rapproche petit à petit de l'homme qu'il était
avant sa déportation. Mais cette forme de "réhumanisation" s'accompagne
d'une profonde douleur morale, faite de souvenirs de cette vie perdue. Il
mesure les aspects positifs de son évolution, qui le distingue du "troupeau" des "non-hommes",
mais ne peut partager avec personne "la douleur de se souvenir, la souffrance
déchirante de se sentir homme", dès lors que sa "conscience émerge
de l'obscurité". Le terme "conscience" est ici essentiel : voilà longtemps qu'il n'en avait plus, lui qui ne réfléchissait
plus en termes de bien et de mal, mais avec la notion de survie, par le recel
et le troc. Rodé à la vie du camp, il maîtrise les techniques
de vol et de revente, pour améliorer son ordinaire. Ces éléments
son par ailleurs toujours présents pour lui, qui voit à cet
effet un avantage non négligeable à travailler au laboratoire : il a accès au savon et à l'essence, des produits introuvables
dans le camp et donc très prisés.
2. Une apparence physique inhumaine
Au laboratoire, Primo Lévi travaille avec des femmes, ce qui lui rappelle à quel
point il est éloigné du jeu de séduction. Il se sait physiquement
très épuisé, comme ses collègues. Il se voit, avec
eux, "ridicule et répugnant", avec le "visage jaune et
bouffi", incroyablement maigre, mal vêtu, sale et "plein de
puces", avec une odeur particulière qui colle à la peau.
Il a des attitudes malpolies, se gratte sans retenue. Cette longue énumération
que fait l'auteur de son état physique en dit long sur la déprime
morale qui ne le quitte plus. La rencontre avec le monde extérieur,
symbolisé par les femmes qui travaillent au laboratoire, fait rejaillir
des sentiments qu'il ne connaissait plus, notamment la honte. Entre prisonniers,
tous semblables, la honte n'existe pas. Face à des individus, qui plus
est des femmes, il a conscience de ne pas pouvoir se présenter sous
son meilleur jour, et cela le mine.
Conclusion
Ainsi, dans cet extrait de
Si c’est un homme, Primo Lévi avance les éléments qui le font remonter dans l'échelle de l'humanité. De l’état
de matricule et force de travail, il devient utile à d'autres travaux
et apprécie à sa juste valeur l'amélioration de son existence.
Tout est bon à prendre lorsque l'on vit dans un camp de concentration.
Mais cette évolution est à double tranchant. Eloigné des
tâches physiques et de la souffrance due aux coups, il découvre
la souffrance morale qui ne le quitte plus. Plus il se rapproche de ce qui fait
un homme, plus il mesure ce qui l'en sépare. Ce passage est par ailleurs
fondamental dans la mise en place de ce livre. C'est en effet au laboratoire,
la nostalgie aidant, qu'il va commencer à noter ses idées : "Alors
je prends mon crayon et mon cahier, et j'écris ce que je ne pourrais dire à personne".