Utopie (1516)

Thomas More (1478 - 1535)

"La ville est reliée à la rive opposée par un pont qui n’est pas soutenu..." à "....une sollicitude plus grande qu’à ces jardins."




Plan de la fiche sur Utopie - Thomas More :
Introduction
Texte étudié
Eléments de commentaire
Conclusion


Introduction

Utopia, de l'auteur anglais Thomas More, est paru 1516. Il sera traduit en français en 1550 (Utopie). C'est un ouvrage fondateur du mouvement humaniste.

Eu topia (grec) : société où l’on est bien.
Ou topia (grec) : lieu qui n’existe pas.

Présentation d’une ville dans une île imaginaire où règne la justice et l’égalité totale (les gens ne possèdent rien).

Thomas More
Thomas More, par Hans Holbein, 1527.



Texte étudié

    La ville est reliée à la rive opposée par un pont qui n'est pas soutenu par des piliers ou des pilotis, mais par un ouvrage en pierre d'une fort belle courbe. Il se trouve dans la partie de la ville qui est la plus éloignée de la mer, afin de ne pas gêner les vaisseaux qui longent les rives. Une autre rivière, peu importante mais paisible et agréable à voir, a ses sources sur la hauteur même où est située Amaurote, la traverse en épousant la pente et mêle ses eaux, au milieu de la ville, à celles de l'Anydre. Cette source, qui est quelque peu en dehors de la cité, les gens d'Amaurote l'ont entourée de remparts et incorporée à la forteresse, afin qu'en cas d'invasion elle ne puisse être ni coupée ni empoisonnée. De là, des canaux en terre cuite amènent ses eaux dans les différentes parties de la ville basse. Partout où le terrain les empêche d'arriver, de vastes citernes recueillent l'eau de pluie et rendent le même service.

    Un rempart haut et large ferme l'enceinte, coupé de tourelles et de boulevards ; un fossé sec mais profond et large, rendu impraticable par une ceinture de buissons épineux, entoure l'ouvrage de trois côtés ; le fleuve occupe le quatrième.

    Les rues ont été bien dessinées, à la fois pour servir le trafic et pour faire obstacle aux vents. Les constructions ont bonne apparence. Elles forment deux rangs continus, constitués par les façades qui se font vis‑à‑vis, bordant une chaussée de vingt pieds de large. Derrière les maisons, sur toute la longueur de la rue, se trouve un vaste jardin, borné de tous côtés par les façades postérieures.

    Chaque maison a deux portes, celle de devant donnant sur la rue, celle de derrière sur le jardin. Elles s'ouvrent d'une poussée de main, et se referment de même, laissant entrer le premier venu. Il n'est rien là qui constitue un domaine privé. Ces maisons en effet changent d'habitants, par tirage au sort, tous les dix ans. Les Utopiens entretiennent admirablement leurs jardins, où ils cultivent des plants de vigne, des fruits, des légumes et des fleurs d'un tel éclat, d'une telle beauté que nulle part ailleurs je n'ai vu pareille abondance, pareille harmonie. Leur zèle est stimulé par le plaisir qu'ils en retirent et aussi par l'émulation, les différents quartiers luttant à l'envi à qui aura le jardin le mieux soigné. Vraiment, on concevrait difficilement, dans toute une cité, une occupation mieux faite pour donner à la fois du profit et de la joie aux citoyens et, visiblement, le fondateur n'a apporté à aucune autre chose une sollicitude plus grande qu'à ces jardins.

Extrait de Utopie (1516) - Thomas More (1478 - 1535)



Eléments de commentaire

Cette ville a été construite dans la cohérence, dans le choix :
    - Ne pas gêner les vaisseaux
    - Eau toujours potable
    - Servir le trafic
    - Fossé impraticable
    - Pour donner du profit et de la joie

Emplacement choisi :
    - Présence de sources
    - Position stratégique : ville basse et haute
    - Proximité de la mer pour le commerce extérieur
    - Fleuve
    - Rues dessinées
    - Pas de ville à proximité de marécages

Ces critères étaient déjà retenus par Platon, etc.…, pour une ville idéale.

Lutte contre les invasions :
    - Remparts hauts et larges
    - Fossé profond
    - Source entourée pour ne pas être empoisonnée

Préoccupations des urbanistes :
    - Maisons uniformes
    - Chaque maison a un jardin dans lequel chacun cultive
    - Maisons attribuées par tirage au sort tous les 10 ans
    - Chaussées qui sont bien dessinées sans causer de nuisances aux gens
    - Eau acheminée dans toutes les parties de la ville par des canaux en terre cuite

Ville fonctionnelle :
    - Sécurité (remparts, fossé, fleuve, élévation du terrain,…)
    - Circulation aisée (pour acheminer les marchandises par chariots)
    - Jardins potagers (permettant de vivre en autarcie = par soi même)
    - Approvisionnement en eau (eau acheminée partout ? adduction d’eau)

Ville harmonieuse :
    - Pas de classes sociales = égalité sociale
    - Tout le monde possède la même chose (les maisons changent d’habitants tous les 10 ans par tirage au sort)
    - La rivalité repose uniquement sur les jardins
    - Pas de délinquance.

Ville ressemblant à la ville de Sparte (garçons et filles élevés de la même manière).
Champ lexical de l’éloge ("des fleurs d’un tel éclat", "pareille abondance, pareille harmonie", "par le plaisir", "de la joie").
Harmonie résultant de l’effort de tous.
Thomas More : humaniste faisant des recherches sur l’architecture (ici recherche pour lutter contre l’invasion, les catastrophes naturelles,..), les qualités des Hommes (vers une société idéale).





Conclusion

    Dans ce texte, Thomas More propose une ville parfaite, inspirée de la vision littéraire des villes antiques : l’urbaniste s’inspire des villes romaines et de la vie sociale des Spartes car ils mettent tout en commun. Il illustre bien en cela l’humanisme en étudiant la fonctionnalité de la ville et en prêtant à ses habitants toutes les qualités attendues (bonté). Ce texte peut donc être mis en parallèle avec la présentation de l’abbaye de Thélème dans Gargantua de Rabelais où ce dernier propose un autre idéal de vie.
    Une telle vision de la société est-elle bien réaliste ?

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Merci à celui ou celle qui m'a envoyé cette analyse de Utopie - Thomas More