Le serpent qui danse

Charles Baudelaire - Les Fleurs du mal




Plan de la fiche sur Le serpent qui danse de Charles Baudelaire :
Introduction
Texte du poème Le serpent qui danse
Annonce des axes
Commentaire littéraire
Conclusion




Introduction

Biographie de Charles Baudelaire

   Charles Baudelaire est l'auteur de Les Fleurs du mal. Recueil poétique condamné à sa publication pour « offense à la morale publique ». Dans ses poèmes, Baudelaire évoque à de nombreuses reprises des figures féminines, notamment Jeanne Duval, une jeune métisse qu'il surnomme sa Vénus noire. Le Serpent qui danse évoque l'amour charnel et passionnel entre Jeanne et le poète. C'est un poème hétérométrique composé de 9 quatrains dont le lyrisme est teinté d'un certain érotisme.


Texte du poème Le serpent qui danse


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Le serpent qui danse


Que j'aime voir, chère indolente,
            De ton corps si beau,
Comme une étoffe vacillante,
            Miroiter la peau !

Sur ta chevelure profonde
            Aux âcres parfums,
Mer odorante et vagabonde
            Aux flots bleus et bruns,

Comme un navire qui s'éveille
            Au vent du matin,
Mon âme rêveuse appareille
            Pour un ciel lointain.

Tes yeux où rien ne se révèle
            De doux ni d'amer,
Sont deux bijoux froids où se mêlent
            L’or avec le fer.

A te voir marcher en cadence,
            Belle d'abandon,
On dirait un serpent qui danse
            Au bout d'un bâton.

Sous le fardeau de ta paresse
            Ta tête d'enfant
Se balance avec la mollesse
            D’un jeune éléphant,

Et ton corps se penche et s'allonge
            Comme un fin vaisseau
Qui roule bord sur bord et plonge
            Ses vergues dans l'eau.

Comme un flot grossi par la fonte
            Des glaciers grondants,
Quand l'eau de ta bouche remonte
            Au bord de tes dents,

Je crois boire un vin de bohême,
            Amer et vainqueur,
Un ciel liquide qui parsème
            D’étoiles mon cœur !

   Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal






Annonce des axes

I. Eloge d'une femme aimée qui invite à la rêverie
A. une déclaration d'amour
B. L'éloge du corps aimé
C. La rêverie du poète

II. Un poème teinté d'érotisme qui montre le pouvoir de la femme
A. La progression érotique du poème
B. Jeanne, une femme marquée par l'ambivalence
C. La situation du poète



Commentaire littéraire

I. Eloge d'une femme aimée qui invite à la rêverie

A. une déclaration d'amour

1. L'énonciation (qui parle à qui)

Dans le poème, le «je» s'adresse à un «tu». Le « je » est le poète et le « tu » est Jeanne Duval, Charles Baudelaire s'adresse donc directement à elle et le tutoiement indique une intimité. Il y a donc une proximité dans le vécu mais aussi une proximité spatiale.

2. Le registre lyrique

Le poème a un lexique affectif important : « chère indolente »... qui montre une intensité amoureuse. Emerveillement du poète, qui est renforcé par des intensifs : « si beau ». Les sentiments sont exprimés à travers une ponctuation expressive, les strophes 1 et 9 se terminent par des points d'exclamation. Le lyrisme est très clair, c'est une véritable déclaration amoureuse.

B. L'éloge du corps aimé

1. L'importance du champ lexical du corps

Strophe 1 : vision globale du corps
Strophe 2 : chevelure, symbole de la féminité
Strophe 3 : retour sur le poète
Strophe 4 : les yeux
Strophe 5 : démarche gestuelle, strophe centrale faisant écho au titre
Strophe 6 : tête
Strophe 7 : à nouveau vision globale
Strophe 8 : la bouche
Strophe 9 : retour sur le poète

Le regard du poète se déplace sur le corps de Jeanne avec un glissement du général au particulier puis de nouveau au général. On peut rapprocher ce poème de la technique du blason, mais ici Baudelaire fait l'éloge de plusieurs parties du corps.

2. Eloge d'une démarche

Le poète semble fasciné par les poses et la démarche de Jeanne: vers 1 « chère indolente » où l'on a l'impression d'une pause lascive et strophe 5 « à te voir marcher en cadence » où l'on peut percevoir les ondulations de Jeanne. Cette démarche est renforcée par l'hétérométrie du poème, il y a une alternance d'octosyllabes et de pentasyllabes (8-5). Le poème ondule donc comme Jeanne et l'image du serpent vient aussi renforcer métaphoriquement l'image de l'ondulation.

C. La rêverie du poète

1. Un rêve exotique

Jeanne invite aux rêves parce qu'elle incarne l'ailleurs, pour Baudelaire l'idéal absolu. Elle est métisse et pour parler d'elle Baudelaire emploie des références exotiques : « âcres parfum » « le serpent » « l'éléphant ». Tout ces éléments donne l'impression qu'elle est un ailleurs, elle invite le poète à un voyage des sens, tout ses sens sont sollicités : « que j'aime voir » « âcres parfum » « vin de bohême » « chevelure profonde » « glacier grondant ».

2. Le voyage du poète

Le poème est traversé par une métaphore filée de la mer et des liquides qui connote l'évasion, le voyage. Grâce à Jeanne, le poète s'évade : « Comme un navire qui s'éveille au vent du matin ». La destination est indéfinie.


Dans ce poème lyrique où le poète fait un hymne à la femme aimée, on peut déceler un érotisme trouble.


II. Un poème teinté d'érotisme qui montre le pouvoir de la femme

A. La progression érotique du poème

1. Le rapprochement physique entre Jeanne et le poète

On note une progression entre le début et la fin du poème. Dans la strophe 1, il y a une distance physique. Le premier signe de l'érotisme est dans la nudité de Jeanne, sous entendu dans la « peau miroite ».
Strophe 5 : il y a un déplacement de Jeanne vers le poète, la marche semble très sensuelle « A te voir marcher en cadence ».
Strophe 7 : changement de position, Jeanne s'allonge, la pose devient lascive. Elle semble s'offrir aux désirs du poète
Strophe 8 et 9 : rapprochement physique entre les 2 amants à travers un baiser ou plus. Union du je avec le tu. Rapprochement entre le début et la fin du poème.

2. De nombreux sous-entendus sexuels

Il y a une autre lecture possible et ce grâce au décryptage des sous-entendus : l'expression « chevelure profonde » peut faire référence à l'intimité féminine, le bâton dans sa verticalité peut faire référence aux désirs du poète, il n'est pas impossible que la strophe 6 contienne une référence sexuelle avec « la tête qui balance », « ses vergues dans l'eau » proximité sonore avec le mot verge. Quant à la dernière strophe, elle consacre l'union des amants, on est là dans un orgasme marqué par l'exclamation et l'expression « ciel liquide », et le mot étoile montre que le poète atteint le septième ciel.

B. Jeanne, une femme marquée par l'ambivalence

1. Une femme inatteignable

Jeanne est double, elle est à la fois passive et active. Passive lorsqu'elle s'allonge et active lorsqu'elle marche en cadence. Elle est femme et enfant : femme car elle est a l'aise dans sa sensualité, provocante, et enfant au vers 24 (« tête d'enfant »).
C'est ce caractère double qui charme le poète puisqu’elle est la réunion des contraires.

2. Une femme difficile à comprendre

Jeanne se donne sans se donner «Ses yeux où rien ne se révèle». Elle garde tout son mystère. Strophe 4, les antithèses doux/amer, or/fer soulignent à nouveau les ambivalences de Jeanne.
On dit souvent que les yeux sont le miroir de l'âme, or ici rien ne se révèle. Le poète ne peut atteindre l'âme de Jeanne. Il peut avoir son corps mais pas son âme.

C. La situation du poète

1. Le poète enivré

On peut parler d'ivresse amoureuse. Le poète est sous le charme de cette femme ambivalente mais il devient dépendant d'elle. Sa salive est assimilée à « un vin de bohème ». Il y a donc l'idée d'une drogue transmise par le baiser de Jeanne.

2. Le poète hypnotisé

La danse de Jeanne hypnotise le poète. Jeanne est assimilée par métaphore à un serpent qui danse, cette animalisation est très symbolique : le serpent est associé dans la religion à l'animal tentateur et maléfique. Il symbolise le mal, ce n'est pas innocent d'y associer Jeanne, elle incite aux péchés. On retrouve ici le plaisir associé au danger.




Conclusion

    Dans Le Serpent qui danse, poème lyrique et érotique, Charles Baudelaire donne de Jeanne une image très ambivalente : c'est une femme qui se donne et se refuse, c'est une femme sensuelle et une enfant, elle apporte le plaisir et le danger. Jeanne Duval est finalement une véritable fleur du mal.






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Merci à celui ou celle qui a réalisé cette analyse de Le serpent qui danse de Baudelaire